Anticipation

  Les lecteurs des premiers RCM , il y a fort longtemps ( c’était avant les radios programmables ) ont peut-être lu un article intitulé : « La radio de l’an 2000 ». L’auteur parlait des progrès souhaitables . 

Avait-il bien anticipé ? 

    Son premier souhait était : « Les commandes principales devraient ne pas devoir être lâchées lors de l’actionnement d’un trim ou d’une commande auxiliaire. » 

    Il préconisait la disposition latérale, sur les côtés en haut du boîtier, de ces boutons ou potentiomètres afin que l’index ou le majeur pussent les mouvoir sans que les pouces quittassent les manches. 

    Certains modélistes de l’époque avaient déjà sur leur émetteur déplacé ces commandes pour leur plus grand confort. 

( photos émetteurs J. Rousseau et B. Rigoulot ) 

    Certains boîtiers modernes placent ainsi des commandes auxiliaires ( photo ) mais les trims sont toujours incongrûment à côté des manches. 

    Le progrès ergonomique n’a donc que partiellement abouti. 

    Son second souhait était la réhabilitation des servos linéaires et leur modernisation ( plus de course ), certes plus coûteux mais géométriquement plus rationnels et qui règnent dans l’aviation grandeur, qu’ils soient hydrauliques ou électriques. 

    Il n’a pas été réalisé mais… on les voit revenir pour actionner les AF, les trains rentrants , les accessoires… et même les commandes des indoors minuscules ! 

    Par contre on constate l’abondance de possibilités de mixages, affectation de fonction à la commande de son choix et… vrai progrès, liaison radio descendante ( avion vers le sol ) permettant affichage ou vocalisation de mesures faites sur l’appareil en vol : état batterie , régime moteur, altimètre, variomètre, vitesse… ( moins facile cette dernière ! voir les remarquables travaux de Francis Thobois ). 

    Là est le progrès majeur que nous n’avions pas anticipé. 

    Alors quels seront les prochains ? 

    L’un apparaît déjà : C’est l’aide au pilotage, autrement dit la stabilisation automatique par gyroscopes et accéléromètres, présente sur les multirotors hérités des drones militaires. Plus fort : elle s’applique sur un appareil commercial à décollage vertical et voilure fixe, semi-maquette du Convair Pogo, vu à notre réunion indoor cet hiver ( vidéo Daniel Gauthey ) à 7'08'' du début de la vidéo.

    On peut sans risque prévoir que cette technique sera appliquée à des jouets volants de plus en plus spectaculaires… et chers. 

    L’autre progrès en gestation est pour l’instant tenu top secret par les grands de la télécommande : 

    LE RETOUR DE FORCE 

    Quand on pilote un vrai avion, pour une même évolution les efforts sur les commandes croissent avec la vitesse ; ou , quand l’appareil est mal trimé, en profondeur par exemple, le pilote doit faire un effort constant sur le manche pour garder le vol horizontal ; il modifie alors le réglage du trim pour annuler l’effort. 

    Sur nos radios rien de tel : Les retours au neutre sont le fait de bêtes ressorts. 

    Maintenant imaginez ce que devient le pilotage d’un modèle réduit avec le retour de force : 

    L’avion bien trimé vole à l’horizontale ; vous entamez une boucle : Vous sentez l’effort résistant sur le manche, d’autant plus grand que vous serrez la boucle ; si vous la faites bien ronde vous sentez la diminution puis l’annulation de l’effort nécessaire au sommet, puis de nouveau sa croissance lors de la redescente arrondie ! 

    Tournez un tonneau rapide et l’effort au manche sera plus important qu’en tonneau lent ! 

    Votre modèle est mal trimé et a tendance à monter ? Vous sentez la poussée nécessaire sur le manche pour conserver le vol horizontal jusqu’à ce que vous ayez rectifié le trim ! 

    COMMENT EST-CE POSSIBLE ? 

    Il y a des servos dans l’émetteur ! 

    Chaque axe d’un manche correspondant à une commande aérodynamique n’a plus de ressort mais est rappelé en position d’équilibre ( on ne parle plus de « neutre » ) par un servo qu’on peut contrarier sans risque pour lui ( très peu d’intensité, électronique adaptée et mécanique réversible ). 

    L’intensité envoyée dans chacun de ces servos pour le mouvoir est proportionnelle à celle mesurée à son correspondant dans l’avion ; ainsi la réaction de chaque commande de l’émetteur est proportionnelle à l’effort aérodynamique mesuré sur la gouverne commandée. 

    Trois voies descendantes suffisent : ailerons, profondeur, direction ; volets et AF en plus pour les versions luxe. 

    Pourquoi pas déjà puisque c’est « si facile » ? 

    Les marques hésitent à bouleverser leur fabrication bien amortie. 

    Les décideurs commerciaux et financiers sont rarement modélistes et n’en comprennent pas l’intérêt. 

    Les révolutions ne sont jamais faciles et rarement bénéfiques : Monsieur Serrier, l’inventeur français du réacteur miniature, n’a pas gagné un sou ; d’autres ont copié son travail. 

    Enfin l’aspect extérieur de ces futures radios sera vraisemblablement bouleversé pour des raisons ergonomiques et la fabrication de nouveaux boîtiers est plus coûteuse qu’une banale adaptation électronique. Comment réagira l’inertie de la clientèle ? 

    Pourquoi ne pas laisser une marque pionnière prendre les risques et copier ensuite sans le moindre effort ? 

    Les pratiques de notre temps sont rarement progressistes. 

    Laissons chacun philosophiquement conclure aurait dit la p'tite Lulu.